Le Temps d'Avant !
Au temps d'avant, des femmes décidèrent de devenir soignantes sans pour autant se consacrer à Dieu. C'était en 1877, lorsque le Conseil municipal de Paris décida de laïciser les hôpitaux et de créer un Centre de formation du personnel soignant. Jusqu'à cette date, les soins aux malades étaient exclusivement protigués par des femmes issues de congrégations religieuses.
En 1878, les premiers cours théoriques et pratiques municipaux débutent à la Salpêtrière grâce au docteur Désiré Magloire Bourneville, médecin aliéniste, adepte de la laïcisation. En 1907, la première École d'Infirmières de l'Assistance Publique ouvrait ses portes.
A ces postulantes à la fonction d'infirmière, il était demandé de faire preuve d'un sens profond de la morale et de la vertu. Elles ne se consacraient plus à Dieu mais à l'administration qui les employait, ce qui revevenait à peu près au même en terme d'abnégation. Ces jeunes femmes étaient souvent mal logées, mal nourries, très peu rémunérées et surtout considérées comme du personnel non qualifié. Leurs conditions de vie étaient somme toute très monacale et les perspectives de construire un foyer plutôt minces par manque de temps. Pour pouvoir être admise à l'école, il leur fallait fournir un certificat de moralité délivré par la municipalité attestant leur bonne vie et leurs bonnes moeurs.
Qu'est ce que la moralité ?
Caractère de ce ou de celui qui peut être apprécié ou jugé selon les notions de bien et de mal, de ce qui est conforme aux principes, à l'idéal de la conduite.
La moralité s'appuie sur des idées manichéennes qui simplifient les rapports au monde. l'homme est bon ou mauvais, il agit en bien ou en mal, il est proche de Dieu ou du diable. Elle fait abstraction de la culture, de la religion, des convictions, de l'identité, de l'histoire de chacun et se construit sur des stéréotypes.
Le Futur Proche
Mais où est donc passé notre futur Code de déontologie rédigé par le Conseil national de l'Ordre des infirmiers en vertu de l'article L. 4312-1du code de la santé publique ?
Et bien, ce projet qui énonce les devoirs des infirmiers dans leurs rapports avec les patients, les autres membres de la profession et les autres professionnels de santé dort dans un tiroir du Ministère de la Santé depuis 2010. Et on se demande si on ne devrait pas se réjouir d'une telle léthargie en regard de ce qu'on y découvre.
Selon l'Ordre National des Infirmiers, ce code a étéélaboré par des infirmiers pour des infirmiers et s'adapte aux évolutions de la profession. Regardons un peu cette grande modernité que l'on nous promet...
Au chapitre II, article 4, il est stipulé que "l’infirmier doit, en toutes circonstances, respecter les principes de moralité, de probité, de loyauté et d’humanité indispensables à l'exercice de la profession."
Et bien voilà, deux petites lignes modernes et avant-gardistes où l'on évoque une notion tout à fait nouvelle et d'actualité, à savoir, la moralité. On se paye donc un voyage dans le temps de plus d'un siècle en arrière sans avoir fait trembler un verre puisque rien n'a changé. L'image de l'infirmière n'a pas bougé d'un iota, seule sa blouse a raccourci.
Un arrêt du Conseil d’Etat du 20 mars 2015 fait injonction au Premier ministre de publier le décret édictant le code de déontologie avant le 31 décembre 2015, sous peine d’astreinte de 500 euros par jour de retard . Nous sommes aujourd'hui le 12 janvier 2016, la tirelire de l'Ordre National des Infirmiers a déjà grossi de 6000 euros. Ces astreintes sont payées par qui d'aillleurs ?
http://www.enssib.fr/bibliotheque-numerique/documents/62829-infirmieres-revues-professionnelles-et-identite.pdf